
Date de sortie : 2004
Réalisateur : Olivier Marchal
Producteurs : Cyril Colbeau-Justin, Jean-Baptiste Dupont, Franck Chorot
Sociétés de production : Gaumont, LGM Cinéma, TF1 Films Production, KL Productions, Canal+, Uni Étoile 2
Principaux comédiens : Daniel Auteuil, Gérard Depardieu, André Dussollier
Note présence tabac à l’écran : *** Note suggestivité/toxicité : ***
Histoire – Léo Vrinks (Daniel Auteuil) est un flic intègre confronté aux agissements et manquements d’une hiérarchie corrompue, en particulier Denis Klein (Gérard Depardieu). Léo se bat comme il peut contre le système mais assiste impuissant aux agissements coupables de sa hiérarchie dont il subit directement et à son corps défendant les conséquences.
Présence tabac – La cigarette apparaît très régulièrement dans le film, en particulier dans les scènes où Daniel Auteuil se trouve acculé, soumis, stressé.
Message subliminal – Confronté à une situation insupportable le bon flic trouve le réconfort dans le tabac ; seul face au monde et à ses injustices il s’appuie sur la cigarette pour tenir. Celle-ci est donc clairement présentée comme un réconfort, un moyen de tenir dans les situations difficiles. Plus subtilement elle s’impose comme le refuge du juste puisque seul le bon flic fume ; face à lui le flic ripoux joué par Gérard Depardieu ne fume pas. Son truc à lui c’est l’alcool.
Réalité – Fumer n’a jamais aidé personne à « tenir », ni à se sentir mieux, ni à lutter contre le stress. Fumer rajoute une couche de souffrance aux existences qui n’en ont généralement pas besoin et, si la cigarette peut parfois être perçue comme salutaire, c’est uniquement parce qu’elle vient assouvir le manque – donc le stress et le mal-être – que provoque la nicotine, autrement dit… le tabac. Créez un manque (c’est le rôle de la nicotine)– donc une souffrance, proposez un produit qui comble ce manque (la cigarette) – et crée donc une dépendance, puis expliquez aux gens victimes du manque que vous avez vous même créé que votre produit leur fait du bien… Bête à mourir ? Voilà pourtant en quoi consiste la réalité du tabac et la stratégie que déploient à coup de milliards de dollars les tobacco companies pour nous faire tomber dans leurs filets. Par sa puissance de suggestion, sa capacité à représenter la vie et à frapper notre imaginaire, le cinéma est en toute logique très vite devenu l’un de leurs outils de propagande privilégiés.
Conclusion – Acteur sublime et homme probablement remarquable, Daniel Auteuil ne sort pourtant pas grandi de ce rôle où il se fait l’apôtre du tabagisme. A-t-il seulement conscience qu’il aura probablement contribué à convaincre par ce rôle plusieurs milliers de jeunes garçons confrontés à l’adversité – n’est-ce pas le propre de la jeunesse ? – à fumer eux-aussi pour « tenir ». Un comédien est un personnage public, les rôles qu’il interprète frappent les esprits… Il se doit donc d’agir de manière responsable et de s’interroger sur la portée du ou des messages que son personnage peut véhiculer. Certains jugeront peut-être bon de faire valoir que la clope fait partie de la panoplie du flic et qu’il est donc légitime qu’elle soit omniprésente dans un film policier et quête de véracité. L’on répondra qu’il s’agit là de l’une des nombreuses images d’Epinal créées de toutes pièces par l’industrie du tabac – au même titre que le cowboy Marlboro – et qu’il n’y a donc là rien de légitime, sauf à vouloir absolument entretenir la flamme d’une industrie qui cause directement et indirectement plusieurs centaines de milliers de morts à travers le monde. Humphrey Bogart aurait légitimement pu dire qu’il ignorait tout des méfaits du tabac lorsqu’il campait, cigarette aux lèvres, ses personnages de flic ténébreux à l’écran. Aujourd’hui Daniel Auteuil et ses employeurs peuvent difficilement plaider l’ignorance. Si à l’écran flics et truands meurent pour de faux, dans la vraie vie les spectateurs victimes du tabac meurent eux pour de bon. A méditer, nous semble-t-il.