En dépit de son titre cet article est sans relation avec le célèbre film d’Alain Resnais, ce dont les amoureux du 7e art voudront bien nous pardonner. Contrairement à nos articles habituels, celui-ci ne traite d’ailleurs pas de la présence du tabac dans un film particulier. Son sujet ? La bombe atomique. Par soucis de cohérence avec notre thématique on retiendra néanmoins que notre propos trouve sa source dans une autre oeuvre mythique – Docteur Folamour, de Stanley Kubrick – toute à la gloire de la bombe H.
Mais que vient donc faire la bombe atomique dans un blog sur le tabac demanderez vous ? Eh bien, ils ont la mort en commun, et dans des proportions étonnamment très comparables : Hiroshima = 70.000 morts ; tabac : 60.000 morts en France, chaque année. Néanmoins, si les chiffres sont, à peu de chose près, identiques, force est de constater que les morts ont, eux, une valeur toute différente : Hiroshima est entré à jamais dans l’histoire ; les morts du tabac n’y auront jamais leur place.
Aussi cruels et insupportables soient les récents attentats récemment commis sur le sol français, ils n’ont jamais fait que 130 morts. Aussi inacceptables soient les accidents – dont certains ont encore dramatiquement endeuillé nos routes ces dernières semaines, ils ne tuent jamais que 4.000 personnes en France chaque année. Dans un cas comme dans l’autre pourtant, l’Etat et, à sa suite, les médias, mobilisent chaque fois d’énormes moyens pour dénoncer l’horreur. Mais, lorsque dans le même temps, l’équivalent d’une bombe atomique explose chaque année en France, faisant potentiellement partir en fumée des villes telles que Levallois, Neuilly, Issy-les-Moulineaux ou encore Clichy… que fait l’Etat ? Que font les médias ? Rien. Silence radio. Un silence assourdissant.
Et lorsque, d’aventure, un journaliste un peu téméraire en vient néanmoins à s’emparer du sujet, il ne faut généralement guère de temps pour que députés, sénateurs et autres experts de tout poil, dûment dépêchés par le lobby du tabac, montent au créneau pour clamer, le petit doigt sur la couture du pantalon, que « mais pas du tout », « rien n’est sûr », « rien n’est prouvé », « tout cela est faux »… Sans oublier les chantres de la liberté qui estiment alors en chœur que « chacun a le droit de faire ce qu’il veut », « que c’est une question de liberté individuelle », « qu’il y en a marre des interdictions ». Viennent enfin, généralement, les buralistes et autres ouvriers du tabac chargés d’attendrir la veuve et l’orphelin (ils sont particulièrement nombreux dans le cas présent) quant à leur sort, avec leur traditionnel couplet sur les emplois que ne manqueraient pas de mettre en péril une nouvelle hausse des prix du tabac ou d’éventuelles restrictions de nature à réduire la consommation.
A tout ceci nous nous bornerons à répondre par ce simple chiffre : 60.000 morts par an en France. Un Hiroshima chaque année. Même si, bien sûr, tous les paramètres de l’équation « tabac » méritent d’être pris en compte par nos dirigeants, il nous semble néanmoins que l’énormité du chiffre devrait suffire à clore le débat une fois pour toutes et justifier des mesures aussi urgentes que radicales. Quant à la question des libertés, on répondra simplement que, dès lors que l’on a affaire à des produits conçus pour être les plus addictifs possibles, elle ne se pose tout simplement pas. Il suffit d’interroger n’importe quel fumeur pour comprendre que non, bien évidemment, il n’est pas libre de ses choix. Sa liberté il l’a perdue le jour où il a fumé sa première cigarette, probablement incité en cela par les messages subliminaux que véhiculent fort complaisamment certains films français, ce qui nous renvoie au propos de ce blog.